« Il faut s’adapter » de Barbara Stiegler

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Barbara Stiegler : "Il faut s'adapter"

L comme libéralisme : Essai de philosophie politique.
Ses origines, son corpus et ses ajustements.
Guerre à la démocratie.

De l’influence du darwinisme dans le champs politique dés les années 1910.
Mise en lumière du libéralisme dans ses ajustements successifs (ultra, ordo, néo), le « principe du ruissellement », de l’usage de la publicité et des « experts » dans la « fabrique du consentement ».
Reprise du grand débat inachevé (sur le libéralisme) entre Walter Lippmann et John Dewey.
Analyse critique de ses dérives actuelles amenant ses « experts » à nier le principe de démocratie.
Face au mur infranchissable de l’environnement : Mise en péril de l’humanité.

Le big bang du darwinisme a participé à la mort de Dieu tout en ouvrant un espace nouveau dans le champ politique. En conséquence la nature n’était plus cet espace clos et immuable créé et ordonnancé par une instance suprême dans lequel l’homme était soumis et contraint mais devenait un espace ouvert, indéfini et changeant, sans règle ni maitre, en évolution permanente, dans lequel il allait falloir vivre et inter-agir seul. Dans ce monde là, seuls « les plus aptes » survivraient. C’est le constat subversif théorisé par le naturaliste Charles Darwin suite à ses observations recueillies au cours d’un tour du monde de cinq ans sur le Beagle (1831-1836), annotées, recoupées, longtemps retardées à la publication pour paraitre enfin en 1859 sous le titre : « De l’origine des espèces » (pensée (chez Darwin) plus complexe qu’il n’est dit ici, à nuancer et pouvant faire l’objet d’interprétations plus mesurées).

La matrice du libéralisme s’est constituée aux USA autour de la personnalité d’un homme, Walter Lippmann, journaliste, diplomate et vulgarisateur dont l’une des particularité fut d’être dans les coulisses du pouvoir sur une très longue période (1910 à 1970), lui-même figure de « l’expert », ce prototype du sachant, cet assimilé « aux plus aptes » de la théorie darwinienne, représentatif de cette élite se donnant pour mission d’éduquer et guider les masses vers cet idéal de la bonne société (« The good society » 1937) en utilisant les pouvoirs incitatifs de la publicité chers à Edward Bernays mais aussi à la recherche de l’autorité nécessaire conférée par le Droit, passage obligé par la case politique pour disposer d’une majorité sur ces lieux où se décident les lois en prenant possession de l’Etat et de ses institutions.

Le libéralisme selon Walter Lippmann dut « s’adapter » lui-aussi aux discussions dans la société américaine, amené à corriger certaines options et se différencier des ultra-libéraux trop ancrés dans « le laisser-faire » du marché omniscient, analyse clairement détaillée par l’auteure Barbara Stiegler mais laissée de côté dans ce résumé pour évoquer la figure de John Dewey (1859-1952), son principal contradicteur frontal qui se refuse à reconnaitre cette République des « experts » et opte pour l’expérimentation véritable de tous, « l’intelligence collective de tous les publics », inséparable du ressenti et de la dimension affective de tout vécu (The Public and its Problems : 1927).

La lecture de cet essai sur le libéralisme de Barbara Stiegler retisse les filiations de ces réseaux de pensées divers qui parcourent les sociétés humaines et concourent à son organisation. Son ouvrage vient à point nommé pour nous éclairer sur cette actualité et nous faire prendre conscience du poids de la chose politique sur notre devenir. Son grand mérite, outre ses qualités d’analyses riches et complexes, est de nous prévenir du fait que, bien souvent, les idées qui font l’Histoire peuvent fort bien se discuter et se prendre en dehors de nous, en dehors du temps et de l’espace où nous vivons.
Une pensée très utile en cet instant T qui enregistre la montée des préoccupations environnementales, prise de conscience plus présente dans la « masse » que chez les « experts », inquiétude qui montent « d’en bas » et vont « ruisseler » vers « le haut » mettant cul par dessus tête toute cette construction pyramidale de la stratégie de conquête néo-libérale.
L’avenir semble vouloir sourire aux « publics » de John Dewey.
Un produit naturel pour effacer ce « There is no alternative ».
Si j’ose, une note maxi ***** pour le charme et l’intelligence de Mme Stiegler.

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Barbara Stiegler

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