Candide, globe-trotteur dépense une fortune pour l’amour d’une blonde.
Non, c’est plus que ça.
– « Qu’est-ce que l’optimisme ? demanda Cacambo
– Hélas ! dit Candide, c’est la rage de soutenir que tout est bien quand on est mal. »
Candide, conte philosophique.
L’histoire de Candide commence au chateau du baron de Thunder-en-tronckh en Wesphalie qu’il doit quitter promptement, chassé à coups de pieds dans le derrière.
Voltaire nous raconte aussitôt le pourquoi du comment.
La jeune Cunégonde aurait surpris le docteur Pangloss dans un petit bois « donnant une leçon de physique expérimentale à la femme de chambre de la mère de Cunégonde« . Cunégonde précise Voltaire, ayant « beaucoup de disposition pour les sciences, observa sans souffler et sans retourna toute pensive, toute remplie du désir d’être savante ».
« Le lendemain après le diner, comme on sortait de table, Cunégonde et Candide se trouvèrent derrière un paravent … leurs mains s’égarèrent. M. le Baron passa auprès du paravent, et voyant cette cause et cet effet chassa Candide à grands coups de pieds dans le derrière. »
L’oisillon Candide tombé du nid se retrouve donc seul sur les routes à la merci de l’adversité contraint à devoir méditer en permanence des causes et des effets, et devoir s’étonner à ses dépends des théories enseignées par son bon maitre Pangloss pour qui tout est toujours pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Commence alors un très long apprentissage du monde tel qu’il est, fait de bruits et de fureurs.
Enrôlé dans les armées Bulgares après bien des déboires, il échappe à une mort certaine sur le champs de bataille et s’évade … tel un migrant fuyant vers un monde meilleur … pour entreprendre un long périple qui va le conduire par monts et par vaux vers sur les chemins de Hollande où il retrouve Pancloss en piteux état « crachant une dent à chaque effort » qui lui apprend les tristes conséquences de la guerre, le chateau détruit, le baron et sa famille trucidés, Cunégonde « éventrée après avoir été violée autant qu’on peut l’être » …
Candide s’évanouie.
Mais il faut repartir. De Dieppe Candide et Pangloss s’embarquent (Hissez haut) pour Lisbonne … qui n’est pas le meilleur des mondes :
naufrage « ils accostèrent sur une planche »,
tremblement de terre, « le dernier jour du monde »
et misère, Pangloss est pendu, Candide fouetté (une fois de plus) et laissé pour mort.
Mauvaises réceptions dans ce meilleur des mondes.
Candide est secouru par la vieille qui prend soin de lui et l’introduit dans la maison ou vie Cunégonde qu’il croyait morte … « des soupirs, des larmes, des cris » mais sous la coupe, pauvre fille, d’un banquier juif colérique et du grand inquisiteur qui se partagent ses charmes. Imbroglio, théâtre de boulevard, confrontations, sortez les épées … double meurtres.
« Sainte vierge ! » …
les forçant à fuir à nouveau (pataclope pataclope) sur trois chevaux andalous, vers Cadix où les nouvelles vont vite et les voila obligés de (hissez haut) prendre le large à destination de Buenos Aires en compagnie d’un aide de camp …
La traversée est l’occasion de faire une pose, raconter sa vie (la vieille), comparer et en apprendre de la condition humaine.
Prenant pied sur le nouveau monde, c’est à nouveau l’enchaînement des causes et des effets (pataclope pataclope) Candide et Cacambo repartent, contraints de gagner le Paraguay, région tenue par les jésuites. Là, surprise, Candide retrouve le baron frère de Cunégonde qu’il croyait mort. Suite à une dispute à propos de Cunégonde, il le tue d’un coup d’épée, aussi sec.
Il faut fuir à nouveau (pataclope pataclope) vers le Pays des Oreillons où les femmes pratiquent la zoophilie. Candide et Cacambo ayant cru bien faire en tuant deux singes coursant deux belles doivent encore fuir, fuir encore et toujours (pataclope pataclope).
Les voici en pays inconnu pénétrant cet étrange Eldorado où il suffit de se baisser pour cueillir or et diamants, Eldorado pays de cocagne où conflits et guerres n’existent pas, Eldorado pays où l’homme blanc n’a jamais pu pénétré.
Languissant de sa Cunégonde séquestrée à Buenos Aires par le gouverneur Don Fernando d’Ibarra, y Figueora, y Mascarenes, y Lampourdos, y Souza … (je reprends mon souffle) Candide décide de quitter ce paradis. Les bras (et les poches) chargés de présents, Candide et Cacambo parviennent au Surinam sur les bords de l’Atlantique. Là, retrouvant l’ancien monde fait de ruffians et de marchands d’esclaves. Candide charge Cacambo d’aller racheter Cunégonde et la vieille à Buenos Aires avec pour projet de se retrouver tous à Venise. Après divers incidents ne pouvant que « le plonger dans une noire mélancolie », Candide parvient à s’embarquer sur un galion français : destination Bordeaux. Victime d’un burn out, il recrute parmi les résidents, le plus malheureux des hommes et l’invite à lui tenir compagnie durant la traversée. Ce sera Martin, savant expert en malheurs, unique et seul vrai manichéen devant l’éternel chargé de soulager ses peines et de le consoler en philosophant sur le malheur des hommes.
Débarquant à Bordeaux, Candide et Martin décident de faire un détour par Paris dont on dit tant de bien dans les estaminets (pataclope pataclope), l’occasion pour Voltaire d’épingler le microcosme littéraire, médical et judiciaire parisien avec Martin toujours présent mais peu efficace à déciller les yeux de cet incorrigible Candide tombant sous le charme tarifé de Mme de Parolignac et dans le traquenard de l’abbé Périgourdin.
Suivant pour une fois les conseils de Martin, Candide soudoie la police qui dirige aussi le groupe de passeurs à Dieppe où « l’on arrête tous les étrangers » … c’est ainsi que nos deux compères arrivèrent à Portsmouth mais repartent aussitôt pour Venise trop « choqués de ce qu’ils voyaient ».
Au chapitre XXIV, Candide croise Paquette sur la place St Marc.
Le monde est petit.
Paquette c’est la femme de chambre de la baronne du chateau de Thunder-en-tronckh en Westphalie qui avait « infecté » le docteur Pangloss … elle a échappé au sort de ses maitres successifs et exerce à Venise le plus vieux métier du monde… et de conter sa vie (avec la plume d’un Voltaire). Puis c’est à frère Giroflée qui accompagne Paquette de se confesser. Martin avait raison, il faut toujours se méfier des apparences.
A Venise, c’est carnaval. Candide et Martin vont en gondole visiter le noble vénitien Pococuranté qui va, par ses propos sans faille, illuminer de joie Martin et remettre un peu de jugeote dans la tête de Candide qui désespère toujours de ne pas voir venir Cunégonde.
Enfin, un soir, lors d’un souper en compagnie de six rois déchus venus passer le carnaval à Venise, « un homme à visage couleur de suie l’aborda » pour lui dire que Cunégonde était à Constantinople.
Cet homme n’est autre que Cacambo devenu esclave d’un des rois déchus de cette assemblée : Achmet III neveu du grand sultan Mahmoud.
Toujours grâce à ses présents rapportés du pays Eldorado, Candide et Martin embarquent avec le sultan pour Constantinople (hissez haut).
Sur le vaisseau, Candide apprend aussi que Cunégonde est esclave du Grand Duc. Le plus triste c’est qu’elle n’est plus un prodige de beauté, « elle est devenue horriblement laide » reconnait Cacambo.
Candide le déplore mais qu’importe, il a encore quelques diamants, de quoi racheter Cunégonde.
Parvenu au détroit de la mer Noire, ils quittent le pont du navire et empruntent une galère devant les conduire à terre à la recherche de Cunégonde et la vieille. Surprise, deux des galériens qui rament ne sont autres que Pangloss et le baron, frère de Cunégonde (!). Effusions, embrassades et récit de leurs mésaventures écourtés par la vue de deux personnes « qui étendaient des serviettes sur des ficelles pour les faire sécher », la vieille et Cunégonde.
Conclusion et moralité.
Après avoir parcouru et découvert le monde tel qu’il était, tous les personnages du conte (excepté le baron viré de l’équipe) se trouvèrent réunis pour la première fois autour d’un Candide à sec, les poches vides, ayant dépensé sa fortune à libérer ses amis et tous, contraints de devoir vivre avec les moyens du bord sur une fermette et son lopin de terre attenant, au bord de la mer Noire.
Deux autres personnages Paquette et frère Giroflet viendront les rejoindre (par pur hasard) et être ainsi sur la photo (happy end).
Leur situation, pourtant, de loin la plus enviable aux précédentes épreuves traversées n’allait pas de soi car très vite Cunégonde « devenant tous les jours plus laide, devint acariâtre et insupportable; la vieille était infirme et fut encore de plus mauvaise humeur que Cunégonde. Cacambo qui travaillait au jardin et allait vendre des légumes à Constantinople, était excédé de travail et maudissait sa destiné. Pangloss était au désespoir de ne pas briller dans quelque université d’Allemagne. Pour Martin, il était fermement persuadé qu’on est également mal partout; il prenait les choses en patience. »
Quelque chose n’allait pas.
Pangloss à qui revenait le privilège de savoir le pourquoi du comment, alla un jour visiter un derviche de renommé pour en discuter, mais les questions que se posait Pangloss agacèrent le fameux turc qui mit dehors le philosophe.
Quelques jours plus tard, Candide Pangloss et Cacambo furent invités chez un vieil homme et ses quatre enfants qui leur firent goûter les fruits de leur jardin. Rentrant chez eux, les trois compères apprécient la sagesse du vieil homme et la douceur d’une vie simple à cultiver son jardin; chacun de reconnaitre que c’était là chose intéressante.
Bientôt, « toute la petite société entra dans ce louable dessein; chacun se mit à exercer ses talents. La petite terre rapporta beaucoup. Cunégonde était à la vérité bien laide mais elle devint une excellente pâtissière. Paquette broda, la vieille eut soin du linge. Il n’y eut pas jusqu’à frère Giroflée qui ne rendit service, il fut un très bon menuisier. » Pangloss se lança dans une longue digression démontrant que si Candide n’avait pas reçu une coup de pied au derrière par le baron … il ne mangerai pas ici « des cédrats confits et des pistaches ».
« Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver son jardin. »
Aujourd’hui, plus de deux siècles et demi après la publication de Candide, viols et meurtres font toujours la une des journaux, tortures et tueries de masse s’affichent sur les écrans, rapines et paradis fiscaux fleurissent aux quatre coins du monde.
Une nouveauté toutefois, la détérioration du climat … faisant de ce jardin, si cher à Voltaire, un lieu de désolation.
Dessinateurs, musicien, cinéaste ayant illustré Candide de Voltaire
Dubout
Wolinski
Joan Sfar
Leonard Bernstein
Norbert Carbonnaux
Hervey
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