Qu’appelle-t-on terres rares ?
Dans son livre « La guerre des métaux rares », Guillaume Pitron évoque par une image simple l’idée de ce qu’est une terre rare. Prenant l’exemple de la boule de pain du boulanger, il énonce les divers ingrédients qui le constitue : un mélange de farine, d’eau, de sel et de levure chimique que l’on met à cuire dans un four.
La terre rare serait cette pincée de sel qu’il faut dissocier et extraire de la boule de pain cuite. Dit autrement c’est tout un processus technico-chimique effectué sur une certaine quantité de terre rocheuse pour en extraire ce sel de la terre nommée terre rare.
Opération délicate !
Ce serait à peu prés cela une terre rare !
Pour être plus précis, les terres rares sont des matériaux constituées d’éléments métalliques, répartis sur le pourtour de la croûte terrestre, répertoriées dans le tableau périodique de Mandeleïev (ci-dessus). Ces terres rares seraient au nombre de 17, le lanthane, le cérium, le praséodyme, le néodyme, le prométhium, le samarium, l’europium, le gadolinium, le terbium, le dysprosium, l’holmium, l’erbium, le thulium, l’ytterbium, le lutécium, le scandium, l’yttrium.
Il peut paraitre curieux de parler de terres rares dans un atelier de peintre (plutôt que de bleu de cobalt ou de lapis-lazuli, de terre d’ombre, de terre de Sienne, de terre de Pouzzoles ou de terre de Nicosie)… mais les tablettes numériques s’étant invitées dans l’exercice de la profession avec la venue et l’usage des nouveaux outils informatiques, pourquoi ne pas pousser plus loin la curiosité, d’autant que l’atelier du peintre n’est pas le seul lieu visé par ces nouveaux matériaux, nos vies à tout un chacun contiennent, alentour, elles aussi, un condensé de ces poussières indispensables au bon fonctionnement de tout ce qui est connecté (ordinateurs, serveurs, téléphones, voitures, avions, bateaux, maisons) … de ce qui (nous promet-on) doit remplacer cette énergie fossile défaillante que sont pétrole et charbon délaissés au profil de ces terres rares entrant dans la fabrication de tous ces nouveaux fournisseurs énergétiques (éoliennes, panneaux solaires, batteries) que l’on considère désormais comme indispensables dans la conduite de la transition énergétique et semblent l’être aux yeux de beaucoup, sans oublier d’autres outils développés en sourdine, classifiés secret-défense et hors d’atteinte du citoyen ordinaire (conquête spatiale, sécurité, armement laser) qui nécessitent eux aussi ce grain de sel de terres rares.
Au final, pour faire tourner le monde de demain, nous allons devoir construire une quantité phénoménale d’outils nécessitant l’ouverture de nouveaux chantiers, casser la roche extirper et rafiner ces filons de terres rares partout où ils se trouvent aux quatre coins de la planète.
« Les études prédisent » explique Guillaume Pitron « que, à l’horizon 2035, la demande germanium va doubler, celle de dysprosium et de tantale quadrupler, et celle de palladium quintupler. Le marché du scandium pourrait être multiplié par neuf, celui du cobalt par vingt-quatre, cent quatre vingt pour le lithium. En clair, ça va être la ruée. »
A bien avoir en tête à la lecture du prochain volet sur les terres rares intitulé :
« Terres rares (2), Stratégie chinoise ».