La sente de la boue jaune

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©hervey – Illustration pour « La sente de la boue jaune »

Su Shi (1037-1101) :
« La sente de la boue jaune »

Je sors de Lin-kao et file vers l’Est
à la chapelle au milieu d’un bois, je tourne vers le nord
je monte la pente de la colline où se trouve le Studio de la neige,
puis emprunte la longue Sente de la boue jaune
le grand fleuve turbulent l’encercle sur le côté gauche
au moins, des vagues de nuages se déploient et s’enroulent
herbes et arbustes prolifèrent sur le côté droit
sur la colline luxuriante des arbres verdoyants scintillent
à l’aube je m’y rends, au crépuscule je reviens
sur le chemin qui serpente je musarde
c’est particulièrement beau ici, mais il est impossible
de s’y installer
laisser mon regard s’y réjouir me suffit amplement
jeune j’aimais déjà l’étrange,
les charmes et les mirages, à la façon des anciens
vieux, du changement je me moque,
j’ai compris le malheur inhérent au monde de poussière
j’ai ôté mon insigne officiel de jade et, vêtu de coton grossier,
me mélange aux gens du marché, sans qu’on me distingue
le chemin est long, il faut cesser d’aller et venir,
et trouver enfin sa place pour mener une vie jusqu’à son terme
parfois je sors marcher et me promener loin
au bout du chemin je m’en retourne
le matin je musarde dans la Sente de la boue jaune
avec les nuages blancs
au crépuscule je me repose au Studio de la neige au milieu
des fumées bleues
réjoui de ne plus effrayer poissons et oiseaux,
heureux que les bûcherons ne fassent plus attention à moi
quand j’ai bien bu, je sors me promener en chantant
soudain je lâche ma canne et ivre m’allonge,
les herbes pour natte, une pierre pour oreiller,
digne comme dans le hall splendide d’un banquet raffiné
la rosée goutte, dense elle mouille mon vêtement
la lune immaculée monte, parfaitement ronde
je remercie le vieux villageois venu me réveiller,
il craignait que ses vaches et ses moutons ne me piétinent
je sursaute et me lève,
me lève et me mets à chanter
la lune claire et les étoiles éparses,
qui m’ont accueilli à mon arrivée, vont m’accompagner à mon retour
quand l’année touchera à sa fin, qu’herbes et arbres
seront flétris,
je m’en retournerai ! je m’en retournerai !
sur la Sente de la boue jaune je ne puis trop longtemps
m’attarder

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