L’empire du vent de Stanley Stewart 11

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Google Map propose cet itinéraire de marche pour joindre Tsetserleg à partir de Chuluut.

Traversée de l’Arhangaï.
Itinéraire de Chuluut à Tsetserleg.

« Les chevaux étaient bons » confirme l’auteur au départ des environs de Chuluut.
« Je montais un bai beau et fort, aux longues oreilles de lapin. Le vieil homme était juché sur un cheval blanc si ventru que ses jambes faisaient saillis sur les côtés. » Le vieil homme se nommait Balginnyam et Balginnyam était leur guide.

Illustration DALL.E et Hervey
« Discuter, philosopher à cheval »
Stanley, Balginnyam, Mandha.

En déambulant à cheval, lorsque la confiance est établie entre le cavalier et sa monture, on peut discuter agréablement de choses et d’autres … c’est même plus simple qu’au volant d’une voiture.
Le cheval sait, de lui-même, fort bien où il marche, là où il doit poser le pied.
A cheval, on est souvent en pilotage automatique.
Balginnyam, en auguste vieillard va ouvrir le bal et enrichir les journées de voyage par de justes propos, de simples confidences sur la vie ordinaire, en évoquant un cas personnel : le retour de son petit fils à la vie nomade alors qu’il vivait avec ses parents, urbanisés et installés à Oulan-Bator.
L’adolescent chétif avait des problèmes de santé et de mal être.
Les parents, inquiets, décidèrent qu’il serait peut-être utile qu’il fasse un séjour chez son grand-père « à la campagne ».
Le vieux Balginnyam le prit sous son aile et le remit très vite en selle, et sur la voie royale (c’est moi qui souligne et utilise ce terme car bien que ça ne soit jamais dit, c’est bien l’idée qui chemine en arrière plan, idée que la vraie vie est dans le nomadisme, le déplacement, la vie dans les pâturages au coeur de la nature, que vouloir vivre autrement c’est s’exposer à une vie de misère.
Balginnyam raconte qu’en suivant les conseils de son grand-père, le garçon travailleur et discipliné, « appris à traire les yacks, à rationner les veaux qui tétaient encore leur mère et à tondre les moutons » … changea bientôt, du tout au tout.
« En l’espace de six mois il était devenu quelqu’un d’autre. »
Se noua alors entre le petit fils et son grand-père une belle et solide affection, le garçon ayant trouvé sa voie grâce en partie à son grand-père et le grand-père, un digne successeur à l’ouvrage de sa vie.
Une histoire simple et vrai, qui va impressionner son auditoire, faisant dire à l’auteur : « il avait la sérénité d’un homme qui a trouvé un sens à sa vie. »
La perspicacité du vieil homme va petit à petit tourner son regard sur l’étranger et opérer quelques courtes séances de « psychanalyse en plein air », l’interrogeant avec curiosité et délicatesse sur sa vie et ses motivations, le sens de sa présence en ces lieux.
Un soir, autour du feu de camps, il conclura ses observations en disant à Stanley :« Vous êtes le badachir », employant un mot qui désignait un solitaire itinérant.
De tous ces échanges va naitre un respect mutuel et une amitié aussi profonde qu’éphémère.
Deux jours plus tard, lorsque viendra le moment des séparations et la fin du voyage aux portes de Tsetserleg, chacun aura saisi et compris que le temps passé à chevaucher était plus qu’un simple échange de services.

Courte vidéo générée par une IA d’après l’image précédente.

Pour l’heure (retour au récit), le chemin qu’empruntent le vieux guide, Stanley et Mandha en direction de Tsetserleg est aussi celui de la transhumance pris par des familles entières remontant vers le nord à la recherche des pâturages d’automne.
Hommes, femmes, enfants, moutons, chevaux, yack, ger, tout ce monde se déplace, crie, s’interpèle, s’amuse, les animaux sont de la partie, bêlent, beuglent, se joignent à la fête et se réjouissent du changements d’herbage.

Illustration DALL.E et Hervey
« L’accident de la route »

Et c’est là au détour d’une vallée que nos trois voyageurs vont devoir porter secours à des femmes et des enfants ayant perdu une roue de leur chariot tiré par un yak.
Accident de la route !
Et il y avait du monde sur ce chariot, une vieille dame, ses filles et une ribambelle d’enfants sans compter tout le nécessaire à la vie nomade entreposé dans des sacs.
Trop de monde, trop de poids et un matos vétuste qui n’avait certainement pas été vérifié au départ et CRACK ! C’est la roue qui cède, le buffle sort sans peine de son attelage et s’en va brouter dans les herbes hautes au bord du chemin mais le chariot est à terre, bancal, tout de travers, sans autre dommage mais personne pour faire la réparation.
On attend les secours.
Nos trois cavaliers de passage vont porter assistance aux accidentés, réparer avec les moyens du bord la pièce défaillante, remettre debout le chariot et son chargement afin que toute la compagnie puisse reprendre sa route, cahin-caha.

Illustration DALL.E et Hervey
« Méditation sous la lune »

Le soir, au bivouac, alors que le vieux guide Balginnyam discute avec Mandha sur les bienfaits de la vie nomade et tempère les allants russophiles et sédentaires de la jeune étudiante d’Olan-Battor, Stanlay se tient à l’écart et médite sous la lune.
Adossé à un arbre, il revoit les évènements survenus ces derniers jours … impressionné par ce grand spectacle vivant de la transhumance dans la traversée des grandes vallées lorsque se déplacent par troupeaux entiers, hommes, femmes, enfants et bêtes … spectacle qui se rejoue chaque année depuis des siècles … touché pareillement, par le récit à portée philosophique du grand-père et de son petit fils, donnant « tout son sens » à l’existence … réflexion en miroir, pensée aussitôt bousculée par une autre événement, l’impromptu du voyage, l’accident du chariot et l’entraide naturelle qui s’en est suivie … autant de choses simples défilant comme des légendes aux résonances saisissantes et profondes, occupant son esprit et l’interrogeant en temps que simple témoin d’un monde tel qu’il est, et pourtant si loin malgré sa simplicité.
Instants de méditation.

La suite au prochain épisode

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